Parmeet est une artiste et biodesigner indépendante dotée d’une connaissance et d’une compréhension de la nature extraordinaire. Originaire du Punjab, au nord de l’Inde, elle a évolué dans le monde du glamour et du luxe avant de se dédier pleinement à la viticulture et à la durabilité. C’est à Cognac où elle est installée avec son mari français, qu’elle innove dans son studio expérimental “Petites Séries” et crée des teintures naturelles entre autres innovations liées au Vivant.
Quelques mots pour vous présenter, Parmeet?
Je viens de l’industrie du parfum et du luxe. J’ai eu une révélation qui m’a poussée à abandonner ce secteur pour m’immerger dans l’agriculture viticole à Cognac, guidée par mon respect pour la nature inculqué dès mon enfance dans le Punjab. J’ai étudié à l’Université de Poitiers, me spécialisant dans le droit, la gestion et le commerce des spiritueux, tout en découvrant l’importance des sols organiques sains.
Je rejette les chemins conventionnels et me concentre maintenant sur la durabilité dans l’industrie des spiritueux, réutilisant des matériaux tels que les feuilles de raisin et les déchets de bois dans mon projet “Des plantes – L’offrande de Sari à la terre noble et aux nobles raisins”
“Mon travail vise à fusionner mode et conscience environnementale, remettant en question les pratiques industrielles et agricoles impactant la planète.”
Je collabore avec des artistes, des communautés et des artisans pour promouvoir un mode de vie durable et une harmonie avec la nature, inspirant à un changement positif vers un avenir plus respectueux de l’environnement.
Pour moi, la nature est bien plus qu’un simple décor ; elle est une muse, un mentor et une compagne constante. Dans mon studio, j’intègre des matériaux organiques et promeut un écosystème de créativité et de durabilité, utilisant des teintures naturelles pour capturer la beauté du monde naturel. Outre mes projets artistiques, je suis également mère, chercheuse et apicultrice.
Parmeet : Parlez-nous de votre projet “Des plantes – L’offrande de Sari à la terre noble et aux nobles raisins”
Pour ce projet, je collabore avec des vignerons bio, tirant parti de feuilles de vigne sans pesticides pour créer des teintures cent pour cent naturelles. Ce processus souligne la capacité des sous-produits agricoles à générer des textiles durables et esthétiques, tout en reflétant un engagement envers l’écologie et la durabilité.
“Je célèbre la générosité de la nature à travers des événements et des performances, rappelant l’abondance et la beauté que la terre offre ! ”
J’aime fusionner la créativité, la durabilité et de respect pour la nature. J’utilise mon art pour explorer et honorer les merveilles du monde naturel, tout en promouvant des pratiques qui bénéficient à la fois à l’humanité et à l’environnement.
Quelles sont les particularités de ce textile ? Le recommanderiez-vous à l’industrie de la mode ?
“Des Plantes – L’offrande de Sari” met l’accent sur la réutilisation des feuilles de vigne, un sous-produit de la viticulture, pour la teinture de textiles.
Ce projet rend non seulement hommage aux viticulteurs biologiques de Cognac mais propose aussi un modèle applicable à d’autres régions viticoles telles que Bordeaux. Il vise à réduire les déchets, favoriser l’économie circulaire, et répondre à la demande croissante pour des produits mode durables.
En fait, il présente plusieurs avantages pour l’industrie de la mode, notamment par la collaboration avec des viticulteurs pour sourcer des feuilles de vigne, la création de collections exclusives, la mise en valeur des techniques artisanales, et l’éducation des consommateurs sur les pratiques durables. Ce faisant, il soutient non seulement l’environnement et l’économie locale, mais ouvre également la voie à l’innovation et à l’intégration des principes de durabilité dans le luxe et la mode, en tirant parti des propriétés uniques des déchets de vigne pour des textiles écologiques et innovants.
Mais il y a aussi des inconvénients car rien n’est permanent… Les teintures naturelles ne peuvent pas être utilisées en gros volumes dans l’industrie de la mode. Leur disponibilité est saisonnière et les couleurs sont variables. Ces contraintes peuvent affecter la production à grande échelle et la régularité de l’approvisionnement, ce qui pourrait ne pas répondre aux besoins des opérations en gros.
Il y a aussi des avantages et des opportunités uniques offerts par les teintures naturelles, telles que leur capacité à célébrer la diversité et l’authenticité des produits naturels, attirant ainsi les consommateurs qui valorisent la durabilité et l’artisanat. Malgré les limitations, il existe des marchés de niche et des marques de luxe qui peuvent tirer parti de l’unicité des teintures naturelles pour se différencier.
Vos multiples projets ont tous un lien sacré avec la nature. Quels sont-ils ?
Dans mes divers rôles d’artiste, d’apicultrice, de chercheuse, d’historienne culturelle et de collaboratrice, ma mission est simple : protéger la nature, préserver les métiers ancestraux et promouvoir la durabilité.
À travers mes efforts artistiques, j’explore le potentiel de matériaux naturels tels que les plantes, les résidus agricoles et les substances dérivées des insectes pour créer des œuvres significatives. En somme, je souhaite que la Nature et les modes de vie ancestraux soient mes co-partenaires !
M’inspirant des économies bioregionales locales, ma ligne de design expérimental crée un marché en expansion pour les matériaux naturels. Cependant, si l’utilisation de restes agricoles pour des matériaux durables offre une solution au gaspillage, cela n’aborde pas les problèmes plus larges de l’impact environnemental de l’agriculture industrielle.
Mon projet, “The Weave“, est un appel à protéger l’art ancien du tissage, permettant aux artisans de prospérer dans un monde moderne tout en honorant l’héritage culturel. Par la collaboration, je vise à tisser un futur où tradition rencontre innovation, la durabilité prévaut et chaque fil raconte une histoire de résilience. Un récent voyage en Inde a souligné l’importance de préserver les métiers traditionnels comme le tissage à la main.
La modernisation menace ces pratiques séculaires, avec les fibres synthétiques remplaçant les matériaux organiques. Protéger la culture du coton et de la soie biologiques, la teinture naturelle et l’impression sur tissu est essentiel pour soutenir les écosystèmes et autonomiser les communautés rurales, en particulier les femmes.
Élargissant mes efforts à l’échelle mondiale, je collabore avec des associations de tisserands locaux en France pour raviver les pratiques traditionnelles de tissage à travers le projet Weave. En plaidant pour des alternatives durables enracinées dans la tradition et la communauté, je travaille à créer un avenir plus interconnecté et conscient de l’environnement.
Un succès notable au sein du projet Weave est notre collaboration sur “Weaving Braille” avec l’artiste Stevie Ronnie. Cette entreprise interdisciplinaire combine le tissage Tangaliya, une forme d’art traditionnel indien vieux de 700 ans, avec la teinture indigo traditionnelle indienne et la langue Braille. Ensemble, nous visons à créer des œuvres d’art tactiles uniques explorant les thèmes de la durabilité, de la tradition, du commerce et de l’amour.
Mon deuxième projet concerne les champignons. La crise environnementale actuelle s’est avérée totale, touchant tous les domaines écologiques et menaçant la biodiversité, le sol, l’eau et l’air.
En réaction à cette crise totale, une quête toujours croissante d’alternatives durables aux matériaux à base de pétrole a émergé. Dans le domaine du design – produits, intérieurs et mode – cela s’est traduit par une augmentation des options naturelles et bio-fabriquées développées au niveau industriel, ainsi que par une augmentation du design expérimental au niveau des studios.
Motivés par la nécessité de préserver les terres pour la production alimentaire, de nombreuses entreprises, ingénieurs en matériaux et designers ont commencé à explorer l’utilisation de sous-produits agricoles industriels pour la production de matériaux durables.
Je suis co-partenaire avec Fungi, Mycelium, l’intriqué réseau de fils fongiques trouvés dans le sol, pourrait être la clé pour atteindre cet objectif. Il sert de partenaire symbiotique naturel aux plantes, améliorant la structure du sol et facilitant l’absorption des nutriments.
En intégrant le mycélium dans ma pratique artistique, je vise à créer des œuvres d’art durables qui célèbrent la biodiversité de la Terre tout en contribuant activement à sa préservation. Un de mes projets implique la fabrication de sculptures de cocons “Coccony” à partir de soie Eri d’Inde, de sciure de bois de Cognac et de mycélium autour de la forêt de Cognac.
C’est une structure développée par les champignons. Ces sculptures ne sont pas destinées à être portées par des humains mais servent d’habitats de nidification pour les oiseaux. J’envisage de placer ces sculptures dans des sanctuaires d’oiseaux et des jardins d’écoles, où elles peuvent fournir des espaces de nidification naturels et durables pour les oiseaux.
De plus, elles servent d’outils pédagogiques pour que les étudiants apprennent la biodiversité et la conservation de l’environnement. Grâce à cette initiative, je ne crée pas seulement de l’art mais je promeus également la sensibilisation et la gestion environnementale.
Enfin, je vais vous parler du projet Tabouret Bourdonnant : Dans la ville animée, au milieu de la jungle de béton, réside un murmure de l’appel de la nature – le bourdonnement des abeilles. Inspirée par leurs efforts inlassables et l’urgence de protéger leurs habitats, en tant qu’apicultrice dévouée, j’ai entrepris un voyage d’innovation et de compassion. Guidée par la sagesse du scientifique Paul Stamets et alimentée par une connexion profonde au monde naturel, je me suis lancée dans la création de quelque chose de cosy – le Tabouret Bourdonnant.
J’ai fabriqué des tabourets en mycélium pour les abeilles exclusivement en utilisant des matériaux durables et un design inspiré. Ces tabourets offrent un sanctuaire pour les abeilles dans l’intimité de leurs ruches, offrant confort et sécurité dans leur environnement naturel.
Photos : Prameetkaur Tesson
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