La fleur de lotus, connue comme une plante aquatique vivace et mythique, peut être utilisée pour obtenir l’un des tissus les plus étonnants et rares pour ses caractéristiques naturelles. Au Cambodge, de nombreuses personnes vivent de la récolte de cette plante, en vendant ses graines pour fabriquer des snacks ou en l’exportant à l’étranger. Alors qu’elle a longtemps été un symbole mythique d’harmonie, elle pourrait aujourd’hui devenir l’alternative parfaite aux tissus synthétiques.
“Entre la soie et le lin”
« Pour beaucoup de cultures asiatiques, les fleurs de lotus symbolisent la pureté divine, apparaissant dans les mains du Bouddha sacré. Elles jouent également un rôle majeur dans le folklore asiatique, et c’est une icône particulièrement importante dans le foyer de nombreux tisserands. Le tissu créé à partir des tiges de la fleur de lotus se présente comme un intermédiaire entre la soie et le lin. Il fut historiquement utilisé pour tisser les robes des moines bouddhistes de haut rang », explique Awen Deleval, le fondateur français de Samatoa, la coopérative de textiles écologique et responsable, sur sa chaîne Youtube.
Après plusieurs mois de recherche au Lotus Center (Battamabang, Cambodge), il a mis au point un tissu décrit comme un croisement entre la soie et le lin, mais doté d’incroyables qualités naturelles : résistance à l’eau et aux taches, respirant, infroissable et doux au toucher.
Le tissus de lotus est fabriqué à la main et prend beaucoup de temps, car un mètre de tissu nécessite environ 32 000 tiges de lotus. Avec 25 femmes, il faut environ un mois et demi pour fabriquer 90 mètres de tissu sans produire de déchets. Les “restes” sont utilisés pour préparer des infusions et des thés.
L’histoire de Phan Thi Thuan, pionnière au Vietnam
La tisserande vietnamienne Phan Thi Thuan a également vu une nouvelle opportunité dans les tiges de lotus qui finissent par pourrir dans les champs voisins après que les graines ont été récoltées pour l’alimentation. Elle a commencé à extraire la fibre contenue dans les tiges pour fabriquer la “soie de lotus”, un tissu prisé par les créateurs de mode.
“J’ai été la première au Vietnam”, raconte fièrement cette femme de 65 ans à l’AFP. La soie de lotus est aussi fabriquée dans des pays voisins comme la Birmanie et le Cambodge, mais dans son pays d’origine, Thuan est considérée comme une pionnière. Elle a reçu le soutien du ministère de la science et de la technologie, qui a lancé un projet national pour tenter de développer cette technique de fabrication.
Phan Thi Thuan a comencé à tisser à l’âge de six ans dans son village de la banlieue de Hanoï. À l’époque, sa grand-tante fabriquait et vendait de la soie traditionnelle aux français pendant la période coloniale et lui a enseigné sa technique.
“Auparavant, les agriculteurs passaient des heures à nettoyer les cultures de lotus pour enlever les tiges pourries, qui ruinent le sol et attirent de nombreux insectes nuisibles. Mais grâce à son initiative visionnaire, Mme Thuan dirige aujourd’hui une équipe d’une vingtaine d’employés, essentiellement des femmes, qui enlèvent les tiges”, explique-t’elle à l’AFP.
Son travail est minutieux. “Une grande écharpe en soie de lotus nécessite le fil d’environ 9 200 tiges et il faudrait deux mois à une ouvrière pour la terminer, mais le jeu en vaut la chandelle”, insiste-t-elle. “Je considère que c’est mon travail, que je crée des emplois et que je fais quelque chose pour l’environnement“, dit-elle.
Une persévérance qui aura sa raison d’être puisqu’un foulard en soie de lotus coûterait dix fois plus cher qu’un foulard en soie ordinaire.
Sofia Vera: soie de lotus et fibres 100 pour cent naturelles
Sofia Vera, une jeune marque de mode française, installée à Biarritz, utilise le tissus de lotus dans ses créations. Lancée cette année, la marque a vu le jour suite à un voyage en Indochine.
Sa fondatrice, Sophie Redhon, a découvert le tissu de soie de lotus et a été immédiatement frappée par la beauté, le toucher et le caractère unique de ce textile rare et exquis, entièrement fabriqué à partir de la tige de la fleur. Tous ses vêtements sont fabriqués dans des tissus rares et luxueux comme la soie de lotus, 100 pour cent naturels.
C’est également le cas pour la marque de luxe italienne Loro Piana, qui a créé sa propre fibre de fleur de lotus améliorée, la “Loro Piana Lotus flower fabric”.
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