Pauline Isambert, agricultrice engagée en Seine-et-Marne, a fondé en 2015 Les Herbes Libres, sa ferme biologique. Depuis, elle cultive avec passion ses aromates, perpétuant le savoir transmis par sa grand-mère, cueilleuse de plantes sauvages.
Pauline Isambert, fondatrice des Herbes Libres
Le printemps est sa saison préférée. Pourtant, en ce début d’automne, Pauline Isambert, agricultrice de plantes aromatiques en Seine-et-Marne, n’hésite pas à enfiler ses bottes et récolter ses herbes malgré les basses températures. Accroupie au milieu des plantes, elle effleure les feuilles, les respire, leur sourit. Depuis la création de sa ferme bio Les Herbes Libres en 2015, la jeune femme ne cesse de se nourrir des savoirs transmis par sa grand-mère, cueilleuse en Corse durant la Seconde Guerre Mondiale. « Elle se soignait avec les plantes aromatiques sauvages », raconte-t-elle. L’enfance de Pauline s’est construite autour de ces herbes et de ces gestes simples et puissants : cueillir le thym, faire des herbiers, préparer des tisanes bien chaudes en hiver. Aujourd’hui, chaque infusion, chaque sirop qu’elle prépare lui rappelle cette transmission, qu’elle souhaite offrir un jour à sa fille. “Je lui apprends déjà que les plantes que je cultive peuvent faire du bien. J’ai une tisane pour soulager les règles. Donc plus tard, j’aurais envie de perpétuer ce lien mère-fille avec des plantes qui soulagent. J’aimerais en tout cas que ce soit la même transmission qu’avec ma grand-mère.” Un lien intime et ancien, qui traverse les générations.
Cultiver la vie
Le parcours de Pauline est celui d’une apprentie passionnée devenue artisane et créatrice : quatre années de stages chez des paysans, une école d’herboristerie à Paris, une formation à la création d’entreprise… Chaque rencontre, chaque apprentissage a façonné son savoir-faire. Dans sa ferme, elle laisse les plantes grandir naturellement : le thym, la menthe, le basilic poussent presque seuls, et leur parfum puissant emplit l’air dès la cueillette.
Elle transforme ensuite cette matière vivante en tisanes, sirops et pestos, en collaborant avec des chefs cuisiniers pour sublimer goût et authenticité. « J’adore faire découvrir ces parfums aux gens, surtout lorsqu’ils sont puissants et intenses », confie-t-elle. La préparation est physique, rythmée par le soleil du matin et du soir en été, ou par des journées complètes en saison fraîche. Mais Pauline est toujours heureuse de faire naître du goût, du plaisir et de la vie à partir de la terre qu’elle cultive.
Féminin, partage et transmission
Être une femme dans l’agriculture est pour Pauline une force : « Je veux montrer qu’on peut être une femme, cultiver, créer et vivre de son activité ». Son lien avec sa fille, encore
petite, est déjà un apprentissage quotidien : transmettre les bienfaits des plantes, le soin, l’écoute de son corps et de la nature.
La ferme devient aussi un lieu de partage : les woofers (ndlr : volontaires qui choisissent de travailler bénévolement sur des fermes biologiques en échange du gîte, du couvert et d’une immersion dans la vie de la ferme), les visiteurs et les collègues producteurs de légumes, pain, ou laine qui collaborent avec elle. Pauline organise parfois des chantiers participatifs où, durant une journée, bénévoles et passionnés viennent l’aider à récolter ou entretenir ses cultures, faisant de son jardin un véritable lieu d’échange et de transmission.
Du jardin aux marchés
Ses produits, vendus sur les marchés de Montreuil, Vincennes et Paris, permettent à un public encore plus large de découvrir ses récoltes et créations artisanales. Tout récemment, Pauline a annoncé sur ses réseaux sociaux que ses tisanes seraient disponibles dès mi-octobre à la Biocoop de la Place des Fêtes, rejoignant plusieurs autres magasins parisiens : Biocoop Un écrin vert à Montreuil, Biocoop Lancry dans le 10ᵉ, Biocoop Parmentier dans le 11ᵉ et Biocoop La Ruche de Tolbiac dans le 13ᵉ. Elle sera présente au marché paysan de Montreuil (métro Mairie de Montreuil), vendredi 10 et samedi 11 octobre dès midi, pour partager ses dernières récoltes et créations.
Même si son activité reste principalement individuelle, Pauline cultive le lien et la transmission à travers chaque geste, chaque rencontre. Elle continue d’explorer de nouvelles recettes et créations, et reste ouverte à partager son savoir avec celles et ceux qui viennent à sa rencontre. Son métier ne se limite pas à travailler la terre : il consiste à faire vivre un héritage, à tisser un rapport sensible à la nature et à exprimer une manière d’être au monde, au féminin, avec générosité et passion. Dans son sourire, dans le geste de ses mains sur les feuilles, dans l’odeur intense du thym et du basilic, se révèle la beauté simple et profonde d’un savoir qui relie les femmes, la nature et le temps.
Texte : Stella Chaspoul Autuoro
Photos : Pauline Isambert
